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Burkina Faso

Qui parle ?

Je m’appelle Yempabou Noel, fils de Abdou Albert COMBARY et de Tapoa Thiombiano, 4e enfant et 3e garçon du coté de ma mère, 24e fils de mon père...

Voilà à peu près comme on se présenterait chez nous… Ce que je suis ou fait ne compte pas, ce que je suis ou fait honorera ou non ma famille, et lui sera compté.

Mais puisque je ne suis plus que dans ma société mais dans un monde global, je suis à présent guide de tourisme, Présidant à l’association Vivre au village VIVAVI, qui a vu le jour depuis 2005 avant d’être reconnue officiellement en 2008. Depuis 2016, je suis aussi à la Présidence de l’association GOURMANTOUR, qui est la faîtière du tourisme de la région de l’Est du Burkina Faso, le pays dont la valeur intrinsèque est l’intégrité. Mais avant, je fus instituteur, et avant… élève… et avant enfant…

Né dans la société gulmance, j’ai grandi aux sources du village où nous avons vécu, alternativement ensuite en ville pendant nos années scolaires.

Mon père était un des 3 premiers élèves de Fada et ma mère a grandi au cœur des traditions royales chez son père SIMANDARI, le « mari du fer » comme son nom signifiait.

J’ai donc grandi au cœur d’une double culture, et dans un milieu en pleine mutation.

De mon milieu, j’ai appris nos totems, les interdits, les bons usages, l’histoire de ma famille, de mon ethnie et les hauts faits de nos rois depuis le fondateur Diaba LOMPO.

À l’école, nous avons appris à lire, à écrire, à parler le français et à pratiquer les usages de la culture française. Et nous étions christianisés.

Si chez nous, toute connaissance était livrée « quand ton âge arrivait » et dans ta famille ou dans le clan, à l’école, nous étions indifféremment de l’âge, du milieu d’origine, soumis au même programme rigoureusement dispensé selon des horaires précis dans l’année.

Et nous pouvions nous-mêmes enrichir nos connaissances par des lectures personnels et des exercices renforcés.

Et j’aimais l’histoire très jeune. Grand lecteur, nous n’avions cependant que majoritairement accès aux auteurs français et occidentaux…

Au terme de mes années scolaires en terminale, je savais plus de l’histoire occidentale et française en particulier que de l’histoire de mon propre peuple, très peu écrite et devenue inaccessible car nous ne conversions plus tant que ça avec nos pères… Nous étions devenus nous-mêmes « des blancs noirs » comme disent les villageois, de ceux qui sont allés à l’école.

De l’image du « blanc » à la rencontre avec les « blancs »

L’image du blanc que nous avions il y a une trentaine d’année était franchement hostile ; c’était l’esclavagiste, le colon, l’exploiteur économique, le raciste, celui qui maintient les autres peuples en sous condition, cruel et félon… Même si bien entendu, c’était aussi le détenteur de techniques et de savoirs infaillibles, lui-même riche et infaillible. Le « blanc » gardait son mythe intact, le presque « dieu », le « dieu » même.

Tout en le haïssant, nous nous efforcions cependant de lui ressembler… et nous rêvions tous d’aller en France, pour nous autres colonisés français.

Et c’est dans ce contexte que j’ai rencontré le français, d’abord dans le travail associatif, puis en amitié. Et peu à peu, il m’est apparu humain…

Et j’ai compris que nous étions tous, de tous les peuples de la terre, les mêmes hommes quant à leur condition. Seules nos visions différaient, nos manières de voir les choses, les techniques et les méthodes auxquelles nous recourions pour résoudre nos problèmes et problématiques, ce que chacun estimait essentiel pour lui surtout.

La méprise m’est apparue évidente, tant que nous ne conversions pas entre peuples comme des frères, tant que nous « rencontrerons l’autre » en l’idéalisant ou en le diabolisant, nous passions à côté du privilège de « connaître » l’autre.

Car en réalité, « ce ne sont pas nos différences qui nous séparent, ce sont nos jugements ».

C’est ainsi que je me suis engagé dans les séjours au village. Et de 2008 à 2012, nous avons accueilli plus de 300 voyageurs vivaviens de tous âges et de toute condition…

Depuis lors, que de fois je me suis écrié : « AH le blanc », et… « AH le noir » ! Et finalement « Vraiment, l’homme quoi !!!!! ».

L’association Vivavi kesako ?

L’association Vivre Au Village est créée depuis 2006 et reconnue en 2008 dans la région Est du Burkina Faso en Afrique de l’Ouest.

Elle se veut une plateforme de rencontres, en vue d’échanges et d’actions interculturelles entre communautés du monde.

Pour cela elle organise des séjours solidaires et touristiques dans sa région et dans le pays, afin de faire vivre à travers les réalités locales, la diversité culturelle de ces « hommes intègres » du Burkina.

Grâce à cette dynamique, c’est tout un réseau d’acteurs qui interviennent à travers l’éthique et le partenariat VIVAVI et qui enrichissent humainement le séjour au-delà du « voir touristique » par ailleurs riche et varié.

VIVAVI conduit par ailleurs actions de solidarité, projets et formations/informations au profit des femmes et enfants en particulier, et des populations en général selon les besoins vécus et les moyens disponibles.

Venir à VIVAVI c’est être le « tchano », « l’hôte » de VIVAVI.

L’équipe VIVAVI est désireuse d’échanges et garantit des séjours sécurisants en accompagnant ses hôtes pendant les séjours.

Entre séjours d’immersion, séjours socio-professionnels et séjours co-construits en amont avec les voyageurs, les possibilités sont nombreuses et ont ravi plus de 300 voyageurs conduits jusque-là par VIVAVI.

Si vous venez à VIVAVI, vous êtes nos « tchambas », nos hôtes. Vous vivrez et partagerez avec nous et nous nous édifierons les uns les autres.

Vision de la solidarité internationale par Noël du Burkina Faso

En premier lieu, la vision des parties prenantes dans le concept de solidarité : de nombreux ressentis d’ici, il ressort que la solidarité de certains cachent une suffisance voire quelques fois un mépris difficiles à vivre pour celui qui accueille. Tant que celui qui se déplace transportera ses normes et ses exigences habituelles dans la culture et le pays qui le reçoit, il y aura toujours des risques de raté… ce qu’on entend ici, c’est que le « blanc » veut que tout marche comme lui le voit alors que « c’est nous qui vivons nos réalités »… Bien des fois hélas, ces occasions de mieux apprécier l’autre débouchent sur des amertumes de part et d’autre qui lassent à la longue…

En deuxième lieu, le dirigisme et l’imposition des termes de l’échange :

« On a parfois l’impression que les gens viennent juste pour imposer leur mode de vie et leurs règles, qu’ils se fichent complètement des réalités qu’ils prétendent pourtant être venus connaître… »

La plupart du temps, on dit qu’on veut aider, mais on ne demande même pas aux intéressés comment eux voient la manière dont ils veulent être aidés ni sur quoi concrètement… On vient avec des projets tous faits, ou on impose les domaines dans lesquels on veut aider, sans se soucier des préoccupations et de ce qui intéresse celui qui reçoit… Conséquence, à moyen terme, personne ne sent responsable de l’action et à la longue, de nouvelles impasses.

Ensuite, la stabilité ou plutôt le manque de stabilité des projets de solidarité.

Beaucoup de projets restent précaires, du fait de querelles et de rivalités des deux côtés. Or, au nom de la solidarité, bien d’engagements se font et bien d’espoirs naissent, qui auraient pu être, avec de la patience et de la détermination, des cadres vraiment dynamiques d’échanges et de mieux être notamment pour les gens d’ici.

Enfin, les abus dans ces projets et le peu de réciprocité.

Comme dans toutes organisations humaines, on n’est jamais à l’abri d’abus et de dérives dans ces cadres, mais dans le domaine de la solidarité internationale, le problème est d’autant plus ressenti car il s’agit de confiance déçue, ce qui fait déchanter bien de personnes et parfois de façon irrémédiable.

En conclusion

La solidarité internationale est certainement un moyen pour non seulement se connaître mais aussi agir ensemble, elle est porteuse pour un mieux-être entre personnes et cultures.

Mais au regard des pratiques actuelles et de ses formes, je me demande s’il ne faut pas redéfinir les termes pour ne pas aller dans le mur…

C’est navrant de voir tant et tant d’initiatives, d’infrastructures, d’engagements etc, qui se terminent en végétation du fait de méprises, d’abus ou tout simplement de désintérêt…

Et l’une des conditions que je voudrais bien inscrire, serait « avant d’aider, assurons nous que nous sommes d’accords, car celui qu’on veut aider doit être lui-même d’abord le porteur et la finalité de ce qu’il reçoit. L’aide ne doit pas être un moyen d’en imposer aux autres ».

Fada 11 janvier 2018

Le rapport à l’argent ici et là-bas

Le blanc est généreux, quand il s’agit d’aider à résoudre un problème social… Bon, seule réserve, il est prêt à mettre ses billes pour un fait… à condition que tous ceux qui vont concourir à cette résolution se mettent à son service… naturellement, même en se ruinant… le bénévolat hélas, est bon pour celui qui a un minimum de sécurité sociale ! Ici, même fonctionnaire, nous n’avons ni assurance chômage, ni assurance maladie, et notre retraite est payée tous les trimestres au montant du salaire que nous touchions par mois… La scolarisation est payante, il n’y a pas de restau du cœur ici… que chez des parents. Et de tes parents qui n’ont jamais travaillé, de tes frères, de tes amis et connaissances, tu restes redevable de devoirs de solidarité dans tous les cas… Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas d’engagement, ni d’abnégation. C’est selon que nous pouvons nous le permettre ou non ! Et seule la confiance et les relations que tu as dans ton milieu te permettent d’activer ou non des mobilisations, payées ou non au premier abord… Car finalement tu payeras ou a déjà payé, dans tous les cas.